Principes du comportement du végétal L’éthylène est un gaz incolore, inodore et très volatil (formule chimique C2H4). Il est produit naturellement par tous les végétaux et est considéré comme une hormone végétale, avec une action sur la maturation et la sénescence. Tous les fruits et légumes ne produisent pas la même quantité d’éthylène et y sont plus ou moins sensibles. Les fruits et légumes dits climactériques, sont ceux qui produisent à un moment précis de leur évolution une grande quantité d’éthylène très rapidement (« pic d’éthylène ») et qui ont la particularité de mûrir après récolte. L’éthylène est produit selon des processus biochimiques internes complexes, à partir d’un acide aminé appelé méthionine. La production (ou émission) d’éthylène des principaux fruits et légumes et ses effets Les fruits et légumes sensibles à l’éthylène possèdent à la surface de leur épiderme, des cellules qui comportent des récepteurs spécifiques. En cas de présence d’éthylène dans l’air, celui-ci se fixe sur les récepteurs et toute une chaîne de réactions métaboliques s’ensuit à l’intérieur de la cellule, jusqu’à une expression particulière des gènes ; les processus de maturation ou de dégradation sont alors enclenchés. Schéma du principe de l’action de l’éthylène sur fruits ou légumes climactériques (source Bouzayen, 2010, adapté Ctifl) Effet sur les fruits et légumes sensibles [Libre accès après inscription gratuite] Résultats d'études techniques Impact de l’éthylène sur quelques fruits et légumes Cas d'un stockage de courte durée en circuit de commercialisation. Concombre Fort impact à faible concentration en éthylène (1 ppm) à partir de 5 à 6 jours de stockage à 10°C : développement des pourritures, ramollissement, jaunissement. La présence d’un film thermorétractable ne protège pas des effets de l’éthylène. Kiwi Fort impact même à faible concentration en éthylène (0,5 ppm) à partir de 4 jours de stockage à 10°C : diminution de 2 kg/0,5 cm² de fermeté par rapport au témoin. Fraise Pas d’impact mis en évidence dans les conditions d’essais, avec une concentration d’éthylène de 5ppm, au bout de 10 jours de stockage à 8°C. Laitue Pas d’impact significatif du développement de pourriture avec une concentration d’éthylène de 1 à 10 ppm, même si le symptôme apparait un peu plus tôt (avant 4 jours à 8°C de stockage) que pour le témoin (après 4 jours), sur les variétés de laitues testées. >> Lien vers Infos Ctifl, mars 2016, n°319, "Impact de l'éthylène sur les fruits et légumes". Mesures des teneurs en éthylène dans le circuit commercial Au stade aval, les concentrations relevées en éthylène sont plutôt faibles dans la plupart des zones de stockage et sur les étals des magasins (ce qui s’explique par la forte volatilité du gaz). Cependant, les concentrations augmentent significativement dans certaines chambres froides avec un taux de remplissage élevé et contenant de gros volumes de fruits émetteurs d’éthylène (pommes, poires). Teneurs en éthylène observées dans différentes zones de stockage – moyennes et écarts types (Les chambres froides des grossistes étudiées contenaient principalement des fruits émetteurs d’éthylène). NB : 1 ppm d’éthylène correspond à la valeur d’1 mL d’éthylène / m3 d’air >> Lien vers Infos Ctifl, oct.2010, n°265, " L'éthylène dans le circuit de commercialisation". Facteurs influençant la production d’éthylène Le stade de maturité à la récolte : Pour les fruits climactériques, la capacité à produire de l’éthylène ne se fait qu’à partir d’un certain stade de maturité. Si le fruit est récolté trop tôt, il perd cette capacité et ne pourra donc plus mûrir après récolte. C’est le cas des produits qui flétrissent avant même de mûrir (ex : pêches ou nectarines). Les facteurs physiques : L’émission d’éthylène s’accélère avec l’augmentation de la température ou la survenue d’un stress du végétal, comme une blessure par exemple. Effet de la température et des chocs mécaniques sur la production d’éthylène de la tomate La variabilité génétique au sein d’une espèce : Allonger la durée de conservation des produits reste un enjeu important pour les sélectionneurs. Par exemple, pour la tomate il s’agit de sélectionner des produits restant fermes et gardant un bel aspect ; cette longue conservation est obtenue par une sélection classique, soit en utilisant des gènes inhibant la maturation (rin, nor, alc,…) soit en cumulant les critères recherchés à partir de différents gènes. Parallèlement les produits obtenus émettent moins d’éthylène. Les mêmes processus de sélection existent pour d’autres espèces (ex. melon). Comment réduire ou limiter le phénomène ? Aux stades de gros et point de vente, les bonnes pratiques de gestion des stocks (quantités ajustées au débit de vente, bonne rotation des produits, …) sont un élément essentiel de la maîtrise de la qualité des fruits et légumes. Des précautions doivent être prises lors du stockage des produits sensibles avec d’autres produits végétaux pouvant être émetteurs d’éthylène : - Adapter les conditions de stockage selon les fruits et légumes Les températures basses de stockage adaptées en fonction des tolérances des fruits et légumes permettent de ralentir le métabolisme des végétaux et par conséquent, de limiter aussi l’action de l’éthylène. De plus, il convient d’éviter d’entreposer des produits émetteurs à proximité directe de produits sensibles à l’éthylène, pour empêcher toute dégradation non maîtrisée. - Réduire ou éliminer les sources d'éthylène Dans de nombreux cas, les fortes teneurs d'éthylène observées dans les aires de stockage et de conditionnement pourraient être limitées : - en supprimant les chariots élévateurs avec moteur à combustion (diesel, gaz) dans les zones de présence de fruits et légumes - en éliminant les écarts de tri et déchets systématiquement - Evacuer l'éthylène présent par ventilation L'air extérieur ne contient pas d'éthylène (hors pollution). Une simple ventilation en continu ou programmée permet de réduire la teneur en éthylène. Ce procédé, qui modifie un peu l'ambiance du local (température, humidité), est très simple et efficace s'il est bien conçu. - Piéger l'éthylène présent Il existe divers procédés technologiques pour adsorber et détruire les molécules d’éthylène de l’air dans une zone donnée (permanganate de potassium KMnO3, charbon actif, rayons Ultra-Violet, catalyseurs…). Il existe aussi à échelle plus réduite, des patches ou tampons absorbeurs d’éthylène, à disposer dans les barquettes ou sachets de produits préemballés (granulés à base d’argiles et de permanganate de potassium). Procédé combiné par filtration et photocatalyse (UV) Procédé par catalyse à UV Procédé combiné par filtration et photocatalyse (UV) - Autre action Dans les stations fruitières et légumières (stockage de longue durée), il est parfois possible d’utiliser un traitement post-récolte ayant une action de blocage de la maturation. La substance active est le 1-MCP (1-Méthyl-Cyclopropène), molécule antagoniste de l’éthylène (=molécule qui prend la place de l’éthylène sur le récepteur spécifique, et qui bloque ainsi son action de manière irréversible). Cette substance active est autorisée par le Règlement (CE) n° 540/2011. Selon les cas, le traitement est utilisé pour bloquer l’apparition de désordres en lien avec l’éthylène (exemple : l’échaudure des pommes). Plus globalement, c’est la limitation de l’action de l’éthylène qui est recherché, afin de maintenir plus longtemps la tenue des produits en conservation (maintien de la fermeté, acidité, couleur de fond). Différentes spécialités commerciales, à base de 1-MCP, existent. Selon les cas, ces spécialités sont actuellement autorisées sur les pommes, les poires, les kiwis, les prunes, les bananes et les tomates (d’après la base de données E-Phy de l’Anses, octobre 2017 ; https://ephy.anses.fr/). En réduisant l’effet de l’éthylène, certains critères de qualité importants dans l’appréciation globale des produits par les consommateurs sont maintenus, comme la fermeté et l’acidité ; mais d’autres critères, comme la production des composés volatils sont parallèlement réduits. Intérêts et limites sont à apprécier selon les produits et leur positionnement commercial, les variétés ou typologies et la durée de stockage envisagée. >> Lien vers Infos Ctifl, avril 2012, n°280, "Impact du traitement Smartfresh (1-MCP) >> Lien vers Infos Ctifl, sept. 2014, n°304, "AC dynamique, élimination de l'éthylène et trempage à l'eau chaude" >> Lien vers Infos Ctifl, sept. 2012, n°284, "Utilisation du 1-MCP (Smartfresh) sur poire" >> Lien vers Infos Ctifl, juil-août 2005, n°213, "Le 1-MCP ou "Smartfresh", un outil de maintien de la qualité" Aspects réglementaires ou normatifs [Libre accès après inscription gratuite]